La BD “SCUM, la tragédie Valerie Solanas” : la femme qui voulait éradiquer les hommes
C’est une claque ! Une grosse claque. D’habitude lorsqu’on lit une bande dessinée, on apprend ou on redécouvre un événement. Là rien, de cela, on prend une claque sur la violence de cette BD, puis on apprend à découvrir le personnage.
Très crue, elle n’est pas à proposer à des enfants.
Entrez dans le monde terrible de la rédactrice du SCUM manifesto, Valerie Solanas, cette femme dans le New-York de la fin des années soixante qui a souhaité la mort de tous les hommes et une société entièrement féminine.
En 1968, Valerie Solanas tente d’assassiner Andy Warhol. S’il y a de la haine et de la folie dans cet acte, elle l’a d’abord commis pour accéder à la célébrité. Devenir célèbre pour faire entendre sa voix et celles de toutes les femmes. Devenir célèbre pour écraser l’immonde et arbitraire patriarcat. Devenir célèbre et promouvoir son manifeste féministe radical : le SCUM manifesto. La cible n’est finalement qu’à moitié atteinte car Valerie Solanas est aujourd’hui surtout connue pour ce crime raté…
Un parcours de vie qui la pousse à la radicalité
L’histoire de cette féministe radicale voire extrémiste est très bien scénarisée, on comprend, très vite pourquoi elle possède une aversion impitoyable contre les hommes. Elle garde un événement traumatique qui va la conduire dans ce parcours à un dégoût profond des hommes.
Prostituée, alcoolique, toxicomane, elle parle à son seul ami un rat imaginaire qui lui répond et la calme.
On voit aussi souvent son double, en fait son âme qui essaie de la raisonner tout comme son rat qui en digressant beaucoup serait son espèce « Jimini Cricket ».
Les scènes sont crues, d’une rare violence, tout comme le personnage qui était capable de violence extrême, puisqu’elle tenta de tuer un homme connu, Andy Warhol.
Dans les bulles de dialogue, lorsque l’héroïne parle “SCUM” la police de caractères est différente. Une partie de ce manifesto est ainsi dévoilé aux lecteurs.
Le SCUM manifesto
Ce qui est remarquable dans cette BD, c’est la capacité à mélanger un récit très irréaliste parler à son rat et que le rat lui répondre, mais aussi la vie du personnage très crue qui subit viols à répétition, fait des passes, son addiction pour les drogues dures.
C’est un parti pris des auteurs qui fonctionne très bien. Le rat comme fil conducteur apporte des éléments de compréhension et apporte aussi à l’héroïne une sorte d’apaisement, de sérénité, Mais comme dans toutes les histoires, son âme pure est aussi présente, elle qui part de son corps quand les moments sont trop douloureux ou violents.
Au-delà de cela, les auteurs n’ont pas souhaité mettre trop en avant la tentative de meurtre d’Andy Warhol, pourtant élément central, afin de ne pas réduire Valerie Solanas à ce seul acte. C’est la vie de cette femme et son SCUM manifesto, acronyme de Society for Cutting Up Men (pourrait se traduire par société pour émasculer les hommes), qu’elle a réussi à faire publier envers et contre tout et ce manifeste féministe radical écrit, auto-édité et diffusé par colportage à partir d’octobre 1967 par la new-yorkaise, son succès est basé sur l’expression d’aspirations sociales et philosophiques du féminisme radical de l’époque. Il sera édité en août 1968 par Maurice Girodias pour Olympia Press, aux États-Unis.
Pour compléter la bande dessinée, une interview de chaque auteur, Théa Rojzam et Bernard Munoz est proposée à la fin de cette bande dessinée atypique.
Une scénariste qui explore la violence, la souffrance et les résiliences humaines

Après des études de philosophie jusqu’en maitrise, Théa Rojzman qui dessine et écrit depuis toujours, suit une formation de thérapie sociale pour devenir psychothérapeute des groupes en crises. Mais elle réalise en même temps une première expérience d’autrice en bande dessinée en mettant son art au service d’une autobiographie familiale : La Réconciliation publiée chez JC Lattès en 2006 avec son père Charles Rojzman. Depuis lors, elle ne quittera plus son envie de faire des livres malgré d’autres activités professionnelles. Elle publiera ainsi en tant qu’autrice complète (scénario, dessin et couleurs) plusieurs albums.
Actuellement, elle se consacre exclusivement à la bande dessinée pour construire des récits nourris en partie de ces autres formations ou expériences professionnelles qui lui ont permis de croiser les savoirs et les intimités. Ses bandes dessinées mélangent les genres (humour, polar, histoire, jeunesse, conte…) tout en explorant inlassablement ses obsessions : la violence, la souffrance et les résiliences humaines. Outre Grand Silence avec Sandrine Revel, elle travaille sur Pie XII, face au nazisme (2 tomes) avec Erik Juszezak (éditions Glénat 2020), SCUM avec Bernardo Munoz (éditions Glénat, 2021) et Billie Bang Bang (3 tomes) avec Steve Baker (éditions Le Lombard 2021).
Cette bande dessinée est disponible dans la collection Karma aux éditions Glénat et comprend 128 pages.
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