La BD « Vinifera : les révoltes vigneronnes » : Trente années qui bouleversèrent la filière viti-vinicole

Le sang de la Terre coule dans beaucoup de veines des habitants du Languedoc. Terre viticole par excellence, nombreux sont les vins réputés de notre belle région. Cependant, il est un pan de l’Histoire, que peut-être, vous ne connaissez pas et qui a changé « le monde du vin ».

En 1907, plus d’un million de personnes du Languedoc-Roussillon, défilent chaque dimanche dans les rues et les places de Montpellier, Narbonne et Béziers pour soutenir les vignerons. C’est une crise viticole majeure, car les vignerons ne vivent pas de leurs récoltes et préfèrent parfois les jeter dans les lits des rivières plutôt que les vendre à bas prix. Cette révolte, réprimée par le cabinet Clémenceau, refuse tout dialogue avec les manifestants. Pour se mettre à la table des négociations, il faudra que le 17e régiment d’infanterie de ligne, rejoigne les manifestants à Béziers.

Meeting vigneron où prennent la parole le maire de Narbonne Ernest Ferroul et Marcelin Albert, le meneur de la révolte des vignerons

Cette révolte faisait suite à de nombreux incidents survenus dans le monde vinicole. La surproduction, les faux vins venant la plupart du temps du Maghreb et la chaptalisation. Ce procédé inventé par Jean-Antoine Chaptal en 1801, avait pour but d’augmenter le degré alcoolique des vins, en ajoutant du sucre au moût, afin d’améliorer leur conservation. Ce procédé n’était pas nécessaire dans le Sud de la France, où le climat méditerranéen rend la chaptalisation assez inutile. S’ensuit donc un combat entre les vignobles du Sud et les betteraviers du Nord.

Le taureau nîmois combat le sucre du Nord

De cette crise vont découler les premières réglementations sur la production de vin qui vont donner naissance, au cours des trente années suivantes, aux appellations d’origine contrôlée, les AOC. Dorénavant le vin est lié à son lieu de production.

Cette partie de l’Histoire viti-vinicole est racontée aujourd’hui, et mise en image, dans la bande dessinée « Vinifera : les révoltes vigneronnes ».

Dans le Languedoc en 1907, Gaston âgé de douze ans, n’aime pas beaucoup l’école. Ce qu’il préfère c’est aider son père à travailler dans la nature sur les vignes familiales. Le travail est pénible mais il aime cela.

Son père qui parle peu ou alors seulement à son épouse est tracassé. Il a les pires difficultés à nourrir sa famille, malgré le dur labeur qu’il produit chaque jour. Les causes de tout cela, sont la concurrence déloyale des fraudeurs, les lois malhonnêtes qui ne protègent pas suffisamment les producteurs.

Les vignerons Français en ont assez et un changement est nécessaire. Aussi une manifestation est prévue dans les prochains jours à Narbonne. Gaston et son père, décident d’y participer. Celle-ci sera réprimée dans le sang. Un drame qui va marquer Gaston pour le reste de sa vie.

Cette bande dessinée, à travers l’histoire de Gaston, revient donc sur les trente années qui ont révolutionné l’histoire du vin jusqu’à la naissance de l’AOC. L’histoire est très intéressante et documentée avec des explications précises sur la fabrication de vin de « substitution ». Les couleurs utilisées reflètent bien les différents états d’âme qui traversent l’histoire du personnage principal. Les dessins sont sombres et pas chargés de détails inutiles, tout est orienté vers la culture de la vigne et la misère des viticulteurs. Cependant les expressions sur les visages des protagonistes sont peu travaillées, ce qui est un peu dommage car cela ne reflète pas les sentiments qu’ils éprouvent, alors que le monde et la France sont confrontés à différents conflits, internes et externes (la Première Guerre mondiale).

Il en reste néanmoins, que le sujet de cette BD est très intéressant pour découvrir une partie de l’histoire de notre terroir (qui pour beaucoup d’entre nous n’est pas connue). En effet, l’appellation d’origine contrôlée est une norme « banale » pour laquelle, et comme beaucoup d’avancées sociales, la question du combat pour l’obtenir ne se pose pas. La chose est réparée avec cet ouvrage.

La BD « Vinifera : les révoltes vigneronnes » est disponible aux éditions Glénat et comprend 56 pages.

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